LA MONTAGNE
24. 05. 2004
Les Editions « Autrement » viennent de faire paraître « Les silences de Tchernobyl », recueil de vérités terrifiantes sur les conséquences de la catastrophe.
C'est loin Tchernobyl ! 2.000 kilomètres, et dix-huit ans déjà! A quoi bon penser à un accident qui a officiellement causé la mort de 32 personnes, provoqué 2.000 cancers. (1) de la thyroïde pour la plupart curables et qui a totalement épargné notre France, première puissance nucléaire du monde.
D'autres voix pourtant, parlent de centaines de milliers de morts, de près de 9 millions de personnes touchées, d'explosion de cancers, de diabètes, de malformations... jusque chez nous où certaines cartes apparues depuis quelques années, montrent la présence de concentration de césium 137 dans l'Est de la France (2).
Alors, à l'heure où de plus en plus de scientifiques indépendants expliquent que la catastrophe du 26 avril 1986 ne fait que commencer, peut-être qu'après tout Tchernobyl n'est pas si loin et que nous sommes plus concernés que nous ne l'imaginions.
La parution de l'ouvrage de Guillaume Grandazzi et Frédéric Lamarchand, « Les Silences de Tchernobyl », devient, du coup, un petit événement pour tout un chacun, et peut-être encore plus pour les Clermontois qui sont, depuis le 21 octobre 1977, jumelés avec la ville de Gomel (500.000 ha, Biélorussie), devenue il y a 18 ans l'agglomération la plus irradiée du monde.
On retrouvera d'ailleurs dans cet ouvrage les collaborations de nombreuses personnes bien connues des Clermontois, à savoir le metteur en scène Bruno Boussagol, mais aussi l'écrivain Svetlana Alexievitch, qui avait rendu visite à Clermont l'an dernier, lors du festival de la Biélorussie, ou encore Galina Bandajevskaya, la femme du professeur emprisonné à Kiev pour avoir dénoncé les effets de la catastrophe et qui est devenu, il y a deux ans, citoyen d'honneur de la ville. Dénonçant la chape de plomb qui recouvre en Biélorussie (3), comme en France, tout ce qui se rapporte à la pire catastrophe de l'histoire de l'humanité, « Les silences de Tchernobyl » donne quelques éléments
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sur ce silence et apporte quelques témoignages sur la terrible réalité. On y découvrira ainsi l'accord de 1959 qui lie l'Organisation mondiale de la santé à l'Agence internationale de l'énergie atomique, et qui explique l'étrange silence de l'OMS sur les conséquences de Tchernobyl. On y apprendra le comportement héroïque et suicidaire des premiers liquidateurs qui ont empêché l'explosion des trois autres réacteurs de Tchernobyl, sauvant l'Europe entière d'une irradiation considérable.
On y apprendra surtout comment, partout, la vérité est muselée, comment à Gomel où seul un enfant sur dix naît aujourd'hui indemne, on a inventé la « radiophobie », maladie psychosomatique qui serait, seule, responsable de l'essentiel des désordres constatés sur place.
Et comment, alors qu'il faut 30 ans pour que le césium 137 perde la moitié de sa radioactivité, on commence, moins de vingt ans après la catastrophe, à organiser le retour des populations en zone contaminée.
Pour ne pas tomber à notre tour dans la « radiophobie » et appréhender cet avenir inquiétant et sans doute inéluctable qui se rapproche de nous, « Les silences de Tchernobyl » constitue un ouvrage indispensable pour échapper à la désinformation.
Amaud VERNET
(1) Chiffres officiels de l'OMS (2) jusqu'à 40.000 bq/m² dans les régions de Besançon, Saint-Etienne, les Alpes-Maritimes et la Corse. De 2.000 à 10.000 bq/m² en Auvergne. (3) Si Tchernobyl se trouve en Ukraine, c'est la Biélorussie qui a été la plus touchée par les radiations. Un tiers de son territoire serait hautement contaminé.
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